15 avril 2011

La loi, c'est la loi

Beaucoup, beaucoup, beaucoup de stress ces derniers temps. Quand c'est comme ça, que le dégoût de la civilisation me gagne, j'ai une solution miracle : je prends la mer. Je ne me lancerai pas avec Renaud dans un débat stérile pour savoir si c'est la mer qui prend l'homme ou lui qui va prendre ma main dans la gueule, je prends la mer, point.

J'ai acheté il y a quelques années un voilier qui m'aide beaucoup parce qu'il faut dire ce qui est : prendre la mer à pied, ça limite tout de suite la durée de la promenade.

Mon voilier s'appelle Marcel, il est long de là à là environ et large d'un quart de cette longueur. Il a deux mâts, pour le cas où l'un d'entre eux tombe en panne, et possède une cuisine Mobalpa très fonctionnelle ainsi qu'une literie Bultex très confortable. Tout ça pour dire que si je veux partir plusieurs jours, semaines, voire années, je peux.

Et donc pas plus tard que cette semaine, le besoin de prendre la mer s'est fait si pressant que j'ai décidé de ne pas résister plus avant et de filer cap Nord-Nord-Ouest toutes voiles dehors. Fouetté par les embruns, je laissais derrière moi le fracas du monde moderne et me rêvais tel Corto Maltese partir à l'aventure. J'en étais à me demander si je n'allais pas même me livrer à quelques actes de piraterie pour me marrer un peu avec les plaisanciers parigots quand, tous gyrophares dehors, je vis venir à moi une bruyante vedette de la vous savez quoi ? la gendarmerie vous savez quoi ? maritime oui, mais avant tout nationale.

La pensée de la piraterie n'étant pas une infraction et de toute façon les télépathes dans la gendarmerie n'étant pas légion (pas plus que les télépathes dans la légion ne sont gendarmerie), c'est plutôt serein que je vis la vedette accoster et deux pandores monter à bord.

"Bonjour les gendarmes, je suis en règle, j'ai mon livre de bord à bord, des fusées de détresse (des tresses ?) plein la cale, des bottes pour pouvoir faire face à la marée chaussé (hi hi hi) et le Marcel est inscrit aux Affaires Maritimes, alors que puis-je faire afin de me montrer serviable pour que vous quittiez au plus vite mon bord et alliez faire chier des marins tout aussi épris de solitude que je le suis ?"

Mon message, destiné à leurs cerveaux, n'a manifestement pas dépassé la barrière de leurs oreilles et encore, je ne sais qu'ils m'ont entendu que  parce que leur regard a transité du stade ovin vers le bovin, qui, si je puis me permettre un petit aparté esthétique, leur sied bien mieux. Puis celui qui avait le plus de barrettes sur les épaules a pris la parole.

- On vient saisir vos voiles, dit-il.

- Je ne saisis pas, m'interloquais-je

- Je sais, je viens de vous dire que c'est nous qu'on saisit. Plus de voiles dans les espaces publiques. Alors on saisit.

- Mon bon, rétorquais-je, vous vous fourvoyez, je crois qu'il s'agit du voile, nom masculin qui fait les femmes voilées, et pas de la voile, nom féminin qui fait avancer Marcel.

- Plus de femme, de bateau, plus rien de voilé dans les espaces publiques. On saisit.

Mettez-vous un instant à ma place. Tétanisé par la connerie. Tellement tétanisé que le temps que je retrouve un semblant de capacité à me mouvoir, la vedette était loin, et mes voiles avec. Et du coup, plus de moyen de locomotion, le Marcel immobilisé.

Heureusement, dans le foutoir qui encombre ma cale, j'ai trouvé la pelle qui me sert en temps normal à creuser la mer quand je veux faire caca (et à reboucher le trou après) et je m'en suis servi comme d'une godille, ce qui fait que je n'ai mis que deux jours et deux nuits à rentrer.

Mais ça fait quand même réfléchir.

Pourquoi un gouvernement néo-fascisant qui veut foutre les musulmans dehors ne les laisse pas mettre les voiles ?

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Encore heureux que les fonctionnaires avaient bien lu "voile" et pas "poil", sinon t'étais mal...

Un poilu