Laissant mon regard trainer sur les clients qui faisaient comme moi la queue à la caisse d'un supermarché de bricolage, j'ai vu un homme à la chevelure poivre et sel habillé de vêtements de sport que l'on classe parmi les vêtements « techniques »: des vêtements d'alpiniste conçus pour vous aider à gravir les plus hauts sommets du globe en conservant une température corporelle satisfaisante. Ces vêtements sont également capables d'évacuer la transpiration afin qu'au sommet, vous puissiez partager avec vos sheirpas un verre de ce champagne qu'ils auront monté à dos d'épaule, sans arborer ces fameuses auréoles sous les bras, si disgracieuses sur la photo qui témoignera de votre exploit. Sport et distinction. Le vêtement du gentleman sportif. Cet homme venu probablement se reposer dans la région où je réside, entre deux treks, m'a impressionné. Je suis par nature impressionnable, à un point tel que ça m'impressionne.
La providence m'avait fait me garer juste à côté de sa voiture ; ce supermarché est il est vrai de petite taille et la providence n'a pas eu à beaucoup œuvrer pour permettre cette promiscuité. J'étais donc idéalement placé pour observer notre homme et repérer, pourquoi pas, un signe pouvant témoigner de ses périples, ceux qui devaient déjà forger sa légende et les prochains, qui la conforteront.
Notre homme, appelons-le ainsi puisque son nom ne m'est pas connu (je ne vais pas me laisser aller à ce subterfuge d'écrivain qui consiste à nommer un homme de papier), notre homme donc... Pardon ? Ça vous perturbe que je l'appelle « notre homme » ? Vous préfèreriez que je lui donne un nom pouvant aller avec ses activités d'athlète de haut niveau ? Ça le rendrait plus vivant ? Bon... ça me chiffonne voyez-vous, mais c'est bien vous qui commandez, hein, puisque c'est le marché qui commande. Oh non, ce n'est pas moi qui le prétend, c'est la vérité éditoriale telle que figurant dans le contrat d'engagement signé (à contre-coeur) par chacun des collaborateurs du Dav'news, à part peut-être la Pétroleuse qui s'affranchit de tout, y compris de refaire le plein... Mais bon, c'est la crise et en temps de crise, on fait des concessions voyez-vous; c'est si dur de refuser le généreux cachet proposé par notre Président. Le contrat stipule donc clairement qu'il nous faut « développer un lectorat CSP+ 35-45 ans, urbains et péri-urbains, en abordant des sujets qui répondent à leurs préoccupations et à leurs attentes ».
Je suis donc bien poussé contractuellement à répondre à votre attente. Vous voulez que je nomme notre homme ? Soit, nommons-le : je vous propose de choisir entre Edmund, en hommage à Edmund Hillary, ce célèbre alpiniste et explorateur néo-zélandais né le 20 juillet 1919 à Tuakau et mort le 11 janvier 2008 à Auckland, ou Roger, comme le non moins célèbre Roger Frison-Roche, explorateur et écrivain né à Paris le 10 février 1906 et mort à Chamonix-Mont-Blanc le 17 décembre 1999, où il est enterré; Frison roche est le célèbre auteur de « Premier de cordée ». Vous voulez voter peut-être ? N'hésitez surtout pas, j'allais dire « ne vous gênez pas ». Je suis là pour vous servir et si je peux vous aider à illustrer votre écran vide, à éclairer votre lanterne basse consommation, à alimenter votre imagerie d'Epinal, sonnez-moi... Donc ? Roger ? Edmund ? Va pour Edmund ! Par 3 voix contre 2 à Roger (notre lectorat se développe !)
Notre néozélandais d'Edmund était donc dans sa voiture de marque allemande. Quoi encore ? Vous ne voulez pas que je me montre si familier avec un homme au si prestigieux pédigrée ? Et de surcroit vous ne souhaitez pas le voir s'installer dans une voiture allemande, préférant l'imaginer dans une voiture anglaise ? Rover, ça irait ? Pas assez chic. Ben ma vache, on s'emmerde pas... Posons le bonhomme dans une Jaguar ! Je reprends : Edmund s'installa dans un coupé sport Jaguar racé gris anthracite aux chromes luminescents.
Et là ! Ô stupeur, Ô merde alors : je le vois qui s'allume un cigarillo puant rien qu'à le voir, et pomper, pomper, pomper encore. Les vitres de sa bagnole, une guimbarde pour tout dire, étaient couvertes de goudron. Il ouvrit sa fenêtre pour cracher sur ma porte en me disant d'un air mauvais « J'aime pas qu'on m'observe, p'tit merdeux ! ». Il démarra alors, me laissant dans l'incapacité de réagir, l'image de l'illustre alpiniste agissant encore en moi. Je recouvris mes esprits comme il partait, me laissant voir sur la tôle se son coffre un autocollant indiquant « J'aime Lourdes ».
Notre homme, Maurice, est allé à Lourdes et non pas sur les plus hauts sommets d'Asie. Il y est allé en bagnole. Il fume du foin. Oui mais il porte des vêtements techniques lorsqu'il va acheter une boite de vis ! Demain, j'irai à mon nouveau boulot habillé en surfeur japonais trilingue. Ça posera son bonhomme !
Ps : je crains de devoir me passer de mon cachet pour au moins deux raisons : d'abord je n'ai pas répondu à votre attente en ne traitant pas ce sujet exactement comme vous l'auriez souhaité, et notre Président ne pardonne pas ce genre de manquement. Ensuite j'ai fait un emprunt à Wikipédia pour vous présenter Edmund, le vrai, en os, et Roger, qu'est mort aussi. Cette imprudence fait tomber cet article sous licence Créative Commons et ne m'autorise à réclamer nulle rétribution. C'est la crise...
2 commentaires:
J'aime beaucoup cette illustration. Ne pourriez-vous pas, techniquement parlant, l'agrandir ? Nous avons un plasma 60 pouces dans le salon, et ça pourrait peut-être passer ? Merci infiniment.
C'est vrai, t'as utilisé du wikiped, mais comme tu n'as fait que le valoriser en te montrant par ailleurs au sommet de ton art, au moins aussi haut dans ton écriture que les deux illustres que tu cites sont allés en altitude, t'as gagné un bonus de St Chinian, cuvée prestige...
Enregistrer un commentaire